Un magasin sans client, sans salarié, sans marge, sans contrôle, sans espace de pouvoir où la confiance règne vous y croyez ? Difficile, tant le modèle et les valeurs de la grande distribution, et plus largement capitalistes et bourgeoises ont façonnés nos habitus. Néanmoins, parmi nous certains cherchent l’alternative : supermarchés coopératifs, collaboratifs, épiceries participatives, citoyennes, etc. Des alternatives qui pourtant reprennent nombre des promesses de la grande distribution et de ses valeurs. Les épiceries “autogérées”, “libres” ou encore en “gestion directe” tranchent dans ce paysage. Lieux d’apprentissage de nouvelles habitudes, de remise en cause frontale du pouvoir pyramidal et pseudo-horizontal. Ce modèle sera évidemment à dépasser après la révolution, mais d’ici-là il fait figure de favori pour une émancipation collective et individuelle.
Le supermarché : une utopie capitaliste désirable pour les tenants de la croyance au mérite
Le supermarché est le modèle hégémonique de distribution alimentaire. Modèle apparu seulement en 1961 en région parisienne il s’est imposé en quelques décennies en colonisant nos vies, nos corps, nos désirs et nos paysages. Cette utopie capitaliste est devenue réalité à coup de propagande mais également d’adhésion résonnant toujours avec les promesses de l’époque : travaille, obéis, consomme ; triptyque infernal où le 3e pilier permet l’acceptation voire l’adhésion aux deux autres à la mesure du mérite individuel fantasmé.
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Malgré le succès et l’hégémonie de ce modèle, il a parallèlement toujours suscité du rejet : son ambiance aseptisée et criarde, industrielle et déshumanisante, la relation de prédation sur les fournisseurs et les délocalisations qui en découlent, sa privatisation par les bourgeois, la volonté de manipuler pour faire acheter plus ou plus différenciant et cher, le greenwashing (le fait de servir de l’écologie de manière opportuniste pour des raisons commerciales), etc., tout ceci alimente les critiques et le rejet chez une frange de la population pour qui la recherche d’alternative devient motrice.
C’est donc contre ce modèle que se (re)créent des alternatives se réclamant d’une démarche plus démocratique, plus inclusive, ou de réappropriation par le citoyen… Or, ces alternatives se réalisent en partant du modèle dominant, jouent sur son terrain selon ses règles et finalement tendent à reproduire souvent coûte que coûte, parfois inconsciemment, les promesses et les côtés désirables du supermarché.
Comme le dit Alain Accardo dans De Notre Servitude Involontaire “ce qu’il faut se résoudre à remettre en question – et c’est sans doute la pire difficulté dans la lutte contre le système capitaliste -, c’est l’art de vivre qu’il a rendu possible et désirable aux yeux du plus grand nombre.”
Le supermarché “coopératif”, l’épicerie participative : des pseudo alternatives au discours trompeur
Un supermarché dit “coopératif” est… un supermarché ! Le projet est de reproduire la promesse mais en supprimant la part dévolue habituellement aux bourgeois : l’appellation “coopératif” fait référence à la structure juridique où les salariés ont le pouvoir et ne reversent pas de dividende à des actionnaires. Mais les salariés ont tendance à se comporter collectivement comme un bourgeois propriétaire d’un “moyen de production” et le recrutement est souvent affinitaire : un bourgeois à plusieurs. La valeur captée sur le travail bénévole est redistribuée essentiellement à quelques salariés. Dans ce type de supermarché, les consommateurs doivent être sociétaires et “donner” du temps pour faire tourner la boutique, en plus du travail salarié qui y a lieu. Cette “coopération” ou “participation” ou “collaboration” c’est 3h de travail obligatoire tous les mois sous peine de sanctions (contrôles à l’entrée du magasin pour éventuellement vous en interdire l’accès). Ces heures obligatoires sont cyniquement là pour créer un attachement des bénévoles au supermarché, comme l’explique aux futurs lanceurs de projet le fondateur de Park Slope Food le supermarché New-Yorkais qui a inspiré tous les autres. Dans le documentaire FoodCoop réalisé par le fondateur de la Louve pour promouvoir ce modèle :”Si vous demandez à quelqu’un l’une des choses les plus précieuses de sa vie, c’est-à-dire un peu de son temps sur terre (…), la connexion est établie.”
L’autre spécificité de ce modèle est l’assemblée générale annuelle pour la démocratie, guère mobilisatrice et non propice à la délibération collective. Pour information, La Louve en 2021 obtient, par voie électronique 449 participations à son AG pour plus de 4000 membres, soit 11%. Presque trois fois moins avant la mise en place de cette solution, en 2019 : 188 présents et représentés soit 4,7%. À Scopeli l’AG se tiendra en 2022 avec 208 sur 2600 membres, soit 8% et enfin à la Cagette sur 3200 membres actifs il y aura 143 présents et 119 représentés soit 8,2%
Pour le reste, vous ne serez pas dépaysés, votre parcours ressemblera à celui dans un supermarché traditionnel. Bien loin des promesses de solidarité, de convivialité, de résistance qui n’ont su aboutir. Les militants voient de plus en plus clairement les impasses de ce modèle mais il fleurit néanmoins dans de nouvelles grandes villes, souvent récupéré comme plan de carrière par des entrepreneurs de l’ESS qui y voient l’occasion de se créer un poste à terme ou de développer un business model autour de la vente de logiciel de gestion d’épicerie en utilisant ce souhait de milliers de gens de trouver une alternative à la grande distribution.
La Louve, le premier supermarché de ce genre, a ouvert à Paris en 2016. Plus de 4000 membres, pour plus d’1,5 million d’euros d’investissement au départ, 3 années de lancement et 7,7 millions de chiffre d’affaires en 2021. À la création il revendiquait des produits moins chers, de fonctionner ensemble autrement, ne pas verser de dividende et de choisir ses produits. Cette dernière est toujours mise en avant sur la page d’accueil de leur site web : “Nous n’étions pas satisfaits de l’offre alimentaire qui nous était proposée, alors nous avons décidé de créer notre propre supermarché.” L’ambition est faible et le bilan moins flatteur encore : vous retrouverez la plupart des produits présents dans les grandes enseignes (loin derrière la spécificité d’une Biocoop, c’est pour dire…), à des prix toujours relativement élevés (application d’un taux de 20% de marge).
À plus petite échelle existent les épiceries “participatives”. La filiation avec le supermarché collaboratif est directe, avec d’une cinquantaine à quelques centaines de personnes. Elles ne peuvent généralement pas soutenir de salariat et amènent des relations moins impersonnelles grâce à leur taille “plus humaine”. Pour autant, certaines épiceries sont des tremplins vers le modèle de supermarché et de création d’emploi pour les initiateurs. Il en existe donc avec salariés. Les marges, selon la motivation à la croissance varient entre 0 et 30%.
MonEpi, startup et marque leader sur un segment de marché qu’ils s’efforcent de créer, souhaite faire tourner son “modèle économique” en margeant sur les producteurs (marges arrières de 3% sur les producteurs qui font annuellement plus de 10 000 euros via la plateforme). Ce modèle très conforme aux idées du moment est largement subventionné et soutenu par des collectivités rurales ou d’autres acteurs de l’ESS et de la start-up nation comme Bouge ton Coq qui propose de partager vos données avec Airbnb lorsque vous souhaitez en savoir plus sur les épiceries, surfant sur la “transition” ou la “résilience”.
Pour attirer le citoyen dynamique, on utilise un discours confus voire trompeur. Le fondateur de MonEpi vante volontiers un modèle “autogéré”, sans hiérarchie, sans chef : “On a enlevé le pouvoir et le profit” . L’informatique serait, en plus d’être incontournable (“pour faire ce que l’on ne saurait pas faire autrement”), salvatrice car elle réduit les espaces de pouvoir en prenant les décisions complexes à la place des humains. Pourtant cette gestion informatisée met toutes les fonctions dans les mains de quelques sachant, le tout centralisé par la SAS MonEpi. De surcroit, ces épiceries se dotent généralement (et sont incitées à le faire via les modèles de statut fournis par MonEpi) d’une organisation pyramidale où le simple membre “participe” obligatoirement à 2-3h de travail par mois tandis que la plupart des décisions sont prises par un bureau ou autre “comité de pilotage”, secondé par des commissions permanentes sur des sujets précis (hygiène, choix des produits, accès au local, etc.). Dans certains collectifs, le fait de participer à ces prises de décision dispense du travail obligatoire d’intendance qui incombe aux simples membres…
Pour finir, nous pouvons nous demander si ces initiatives ne produisent pas des effets plus insidieux encore, comme la possibilité pour la sous-bourgeoisie qui se pense de gauche de se différencier à bon compte : un lieu d’entre-soi privilégié où on te vend, en plus de tes produits, de l’engagement citoyen bas de gamme, une sorte d’ubérisation de la BA citoyenne, où beaucoup semblent se satisfaire d’un énième avatar de la consom’action en se persuadant de lutter contre la grande distribution. De plus, bien que cela soit inconscient ou de bonne foi chez certains, nous observons dans les discours de nombre de ces initiatives ce que l’on pourrait appeler de l’autogestion-washing, où les inégalités de pouvoir sont masqués derrière des mots-clés et des slogans (Cf. “Le test de l’Autogestion” en fin d’article).
L’enfer est souvent pavé de bonnes intentions. Et on pourrait s’en contenter et même y adhérer faute de mieux. Mais ne peut-on pas s’interroger sur les raisons de poursuivre dans des voies qui ont clairement démontré leurs limites alors même qu’un modèle semble apporter des réponses ?
L’épicerie autogérée et autogouvernée / libre : une utopie libertaire qui a fait ses preuves
Parfois nommé épicerie autogérée, coopérative alimentaire autogérée, épicerie libre ou encore épicerie en gestion directe, ce modèle de commun rompt nettement avec nombre des logiques décrites précédemment. Il est hélas largement invisibilisé par la communication des modèles sus-nommés et paradoxalement par son caractère incroyable au sens premier du terme : ça n’est pas croyable, ça remet en question trop de pratiques culturelles, il est difficile d’en tirer un bénéfice personnel, c’est trop beau pour être vrai…Car de loin, cela ressemble à une épicerie, il y a bien des produits en rayon mais ce n’est pas un commerce, c’est un commun basé sur l’égalité et la confiance. L’autogestion dont il est question ici se rapproche de sa définition : la suppression de toute distinction entre dirigeants et dirigés.
Mais commençons par du concret ? À Cocoricoop , épicerie autogérée à Villers-Cotterêts (02), toute personne qui le souhaite peut devenir membre, moyennant une participation libre aux frais annuels (en moyenne 45€ par foyer couvrant loyer, assurance, banque, électricité) et le pré-paiement de ses futures courses (le 1er versement est en général compris entre 50€ et 150€, montant qui est reporté au crédit d’une fiche individuelle de compte). À partir de là, chacun.e a accès aux clés, au local 24h/24 et 7 jours/7, à la trésorerie et peut passer commande seul ou à plusieurs. Les 120 foyers membres actuels peuvent venir faire leurs courses pendant et hors des permanences. Ces permanences sont tenues par d’autres membres, bénévolement, sans obligation. Sur place, des étagères de diverses formes et tailles, de récup ou construites sur place sont alignées contre les murs et plus ou moins généreusement remplies de produits. On y fait ses courses, pèse ses aliments si besoin puis on se dirige vers la caisse… Pour constater qu’il n’y en a pas. Il faut sortir une calculatrice et calculer soi-même le montant de ses courses. Puis, ouvrir le classeur contenant sa fiche personnelle de suivi et déduire ce montant de son solde (somme des pré-paiements moins somme des achats). Personne ne surveille par dessus son épaule, la confiance règne.
Exemple de fiche de compte
Côté “courses”, c’est aussi simple que cela, mais on peut y ajouter tout un tas d’étapes, comme discuter, accueillir un nouveau membre, récupérer une débroussailleuse, participer à un atelier banderoles pour la prochaine manif (etc.). Qu’en est-il de l’organisation et l’approvisionnement ?
Ce modèle de commun dont la forme épicerie est le prétexte, cherche avant tout, à instituer fondamentalement et structurellement au sein d’un collectif les règles établissant une égalité politique réelle. Toutes les personnes ont le droit de décider et prendre toutes les initiatives qu’elles souhaitent. “Chez Louise” dans le Périgord (Les Salles-Lavauguyon, 87) ou encore à Dionycoop (St-Denis, 93), comme dans toutes les épiceries libres, tout le monde peut, sans consultation ou délibération, décider d’une permanence, réorganiser le local, organiser une soirée, etc. Mieux encore, toute personne est de la même manière légitime pour passer commande au nom du collectif en engageant les fonds disponibles dans la trésorerie commune auprès de tout fournisseur ou distributeur de son choix. La trésorerie est constituée de la somme des dépôts de chaque membre. Les membres sont incités à laisser immobilisé sur leur fiche individuelle une partie de leurs dépôts. Au Champ Libre (Preuilly-Sur-Claise, 37), 85 membres disposent de dépôts moyens de 40-50€ permettant de remplir les étagères de 3500€ selon l’adage, “les dépôts font les stocks”. La personne qui passe la commande s’assure que les produits arrivent à bon port et peut faire appel pour cela au collectif.
D’une manière générale, les décisions n’ont pas à être prises collectivement mais chacun.e peut solliciter des avis.
Côté finances, à Haricocoop (Soissons, 02), quelques règles de bonne gestion ont été instituées. Une créditomancienne (personne qui lit dans les comptes bancaires) vérifie que le compte est toujours en positif et un “arroseur” paye les factures. La “crédito” n’a aucun droit de regard sur les prises de décision individuelle, elle peut seulement mettre en attente une commande si la trésorerie est insuffisante. Il n’y a pas de bon ou de mauvais arroseur : il voit une facture, il paye. Une autre personne enfin vérifie que chacun a payé une participation annuelle aux frais, sans juger du montant. Ces rôles et d’une manière générale, toute tâche, tournent, par tirage au sort, tous les ans afin d’éviter l’effet “fonction” et impliquer de nouvelles personnes.
Tout repose donc sur les libres initiatives des membres, sans obligations : “ce qui sera fait sera fait, ce qui ne sera pas fait ne sera pas fait”. Ainsi, si des besoins apparaissent, toute personne peut se saisir de la chose et tenter d’y apporter une réponse. Le corolaire étant que si personne ne décide d’agir alors rien ne sera fait et les rayons pourraient être vides, le local fermé, les produits dans les cartons, (etc.). Il devient naturel d’accepter ces ‘manques’ s’il se produisent, comme conséquence de notre inaction collective et individuelle ou l’émanation de notre niveau d’exigence du moment.
Toute personne peut décider et faire, mais… osera-t-elle ? L’épicerie libre ne cherche pas à proposer de beaux rayons, tous les produits, un maximum de membres et de chiffre d’affaires, contrairement à ce qui peut être mis en avant par d’autres initiatives. Certes cela peut se produire mais comme une simple conséquence, si la gestion directe et le commun sont bien institués ou que cela correspond au niveau d’exigence du groupe. C’est à l’aune du sentiment de légitimité, que chacun s’empare du pouvoir de décider, de faire, d’expérimenter ou non, que se mesure selon nous, le succès d’une épicerie de ce type. La pierre angulaire de ces initiatives d’épiceries libres et autogouvernées repose sur la conscience et la volonté d’instituer un commun en le soulageant de tous les espaces de pouvoir que l’on rencontre habituellement, sans lequel l’émancipation s’avèrera mensongère ou élitiste. Une méfiance vis-à-vis de certains de nos réflexes culturels est de mise afin de “s’affranchir de deux fléaux également abominables : l’habitude d’obéir et le désir de commander.” (Manuel Gonzáles Prada) .
L’autogestion, l’autogouvernement, la gestion directe, est une pratique humaine qui a l’air utopique parce que marginalisée ou réprimée dans notre société : nous apprenons pendant toute notre vie à fonctionner de manière autoritaire, individualiste et capitaliste. Aussi, l’autogestion de l’épicerie ne pourra que bénéficier d’une vigilance de chaque instant de chacun et chacune et d’une modestie vis-à-vis de cette pratique collective et individuelle. Autrement, parce que les habitudes culturelles de domination/soumission reviennent au galop, le modèle risque de basculer vers l’épicerie participative par exemple. Il convient donc de se poser la question de “qu’est-ce qui en moi/nous a déjà été “acheté”, approprié par le système, et fait de moi/nous un complice qui s’ignore ?” ^9 (ACCARDO) et qui pourrait mettre à mal ce bien commun.
S’affranchir de nos habitus capitalistes ne vient pas sans effort. Ce modèle-là ne fait pas mine de les ignorer, ni d’ignorer le pouvoir qu’ont les structures et les institutions pour conditionner nos comportements. C’est ainsi qu’il institue des “règles du jeu” particulières pour nous soutenir dans notre quête de confiance mutuelle et d’égalité politique. Elles se résument ainsi :
Ce modèle d’épicerie libre diffère ainsi très largement des modèles que nous avons pu voir plus tôt. Là où la Louve cherche l’attachement via la contrainte, les épiceries autogérées cherchent l’appropriation et l’émancipation par ses membres en leur donnant toutes les cartes. Nous soulignons ci-dessous quelques unes de ces différences majeures :
Peut-on trouver une alternative vraiment anticapitaliste de distribution alimentaire ?
Reste que quelque soit le modèle, il s’insère parfaitement dans la société de consommation, parlementant avec les distributeurs et fournisseurs. Il ne remet pas en cause frontalement la logique de l’économie libérale qui a crée une séparation entre consommateur et producteur, qui donne une valeur comptable aux personnes et justifie les inégalités d’accès aux ressources sur l’échelle de la croyance au mérite. Il ne règle pas non plus par magie les oppressions systémiques.
Ainsi, tout libertaire qu’il soit, ce modèle d’épicerie libre pourrait quand même n’être qu’un énième moyen de distinction sociale petit-bourgeois et ce, même si une épicerie de ce type a ouvert dans un des quartiers les plus défavorisés du département de l’Aisne (réservée aux personnes du quartier qui s’autogouvernent) et que ce modèle génère très peu de barrière à l’entrée (peu d’administratif, peu d’informatique,…).
On pourrait aussi légitimement se poser la question de la priorité à créer ce type d’épicerie par rapport à toutes les choses militantes que l’on a besoin de mettre en place ou des luttes quotidiennes à mener. Mais nous avons besoin de lieux d’émancipation qui ne recréent pas sans cesse notre soumission aux logiques bourgeoises et à leurs intérêts et institutions. Une telle épicerie permet d’apprendre à mieux s’organiser collectivement en diminuant notre dépendance aux magasins capitalistes pour s’approvisionner (y compris sur le non alimentaire). C’est d’autant plus valable en période de grève puisqu’on a tendance à enrichir le supermarché à chaque barbecue ou pour approvisionner nos cantines et nos moyens de lutte.
Au-delà de l’intérêt organisationnel, c’est un modèle de commun qui remet en question concrètement et quotidiennement les promesses et les croyances liées à la grande distribution. C’est très simple et très rapide à monter. Aucune raison de s’en priver d’ici la révolution !
Le Test de l’Autogestion : un outil rapide et puissant pour tester les organisations qui s’en réclament
À la manière du test de Bechdel qui permet en trois critères de mettre en lumière la sous-représentation des femmes et la sur-représentation des hommes dans des films, nous vous proposons un nouvel outil pour dénicher les embuscades tendues par l’autogestion-washing, en toute simplicité : “le test de l’Autogestion” :
Les critères sont :
- Pas d’AGs ;
- Pas de salarié ;
- Pas de gestion informatisée.
Ces 3 critères ne sont pas respectés ? Le collectif ou l’organisme n’est pas autogéré.
Il les coche tous ? C’est prometteur, vous tenez peut être là une initiative sans donneur d’ordre individuel ni collectif, humain comme machine ! Attention, le test de l’autogestion permet d’éliminer la plupart des faux prétendants au titre, mais il n’est pas une garantie à 100% d’un modèle autogéré, il faudra pousser l’analyse plus loin. Comme le test de Bechdel ne vous garantit pas un film respectant l’égalité femme-homme.
Il faut parfois adapter les termes, peut être le collectif testé n’a pas d’Assemblée Générale mais est doté de Réunions de pilotage, n’a pas de salarié mais des services civiques, n’a pas de bureau mais des commissions/groupe de travail permanents, n’a pas de logiciel informatique de gestion mais les documents de gestion ne sont pas accessibles sur place ?
Pour aller plus loin :
Le collectif Cooplib fait un travail de documentation de ce modèle de commun et d’autogestion. Ses membres accompagnent de manière militante les personnes ou collectifs qui veulent se lancer (= gratuit).
Sur Cooplib.fr, vous trouverez des informations et des documents plus détaillés :
– La brochure Cocoricoop
– Un modèle de Statuts associatif adapté à l’autogestion
– La carte des épiceries autogérées
– Le Référentiel (règles du jeu détaillées)
Ces outils sont adaptés à la situation particulière des épiceries mais ils sont transposables au moins en partie à la plupart de nos autres projets militants qui se voudraient vraiment autogérés (bar, librairie, laverie, cantine, camping,…). Pour des expérimentations plus techniques (ex : garage, ferme, festival,…), une montée en compétence des membres semble nécessaire.
D’autres ressources :
– Quelques capsules vidéos : http://fede-coop.org/faq-en-videos/
– “Les consommateurs ouvrent leur épiceries, quel modèle choisir pour votre ville ou votre village ?”, les éditions libertaires.
Pour échanger avec le collectif ayant rédigé l’article : frustration-autogeree@proton.me
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