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Comme si les petites leçons de bonne conduite du gouvernement – que nous avons décrites ici – ne suffisaient pas, chacune et chacun semble invité, sur les réseaux sociaux, à cibler et dénigrer les “mauvais” déconfinés, celles et ceux qui n’appliqueraient pas strictement les consignes officielles et nous menaceraient par leur légèreté d’une hypothétique “deuxième vague”. Jérémy Guichard en a eu assez de cette ambiance vichyste, et le dit haut et fort :

Stop ! Et si l’on arrêtait les leçons de morale à deux balles sur les gens déconfinés qui sortent dans la rue sans masque ou regroupés par bande de 3 ou 4 amis ?

D’abord, d’un côté nous avons les éditorialistes de plateau qui servent la soupe à la télé pour nous montrer les français « irresponsables ». Ils nous font la morale depuis 2 mois alors que leur métier était loin d’être indispensable. Ils étaient là, sans masque, nous demandant d’en porter entre deux toussotements de plateau mal étouffés.

Le 12 mai sur LCI, Jean-Michel Aphatie regrettait que seules les « populations éduquées et habituées à la notion de citoyenneté » recevaient les messages d’application des gestes barrières. Nous, qui dépendons souvent de l’espace public pour profiter du plein air, sommes surement trop cons pour comprendre. Notons tout de même que les grands médias (presse, radio ou télévision) ont d’ailleurs démontré leur totale nullité dans leur mission d’information. A l’image de l’Express qui fin janvier titrait « Coronavirus chinois en France : quatre raisons de ne pas céder à la panique ». S’en suivra pourtant des mois de paniques et d’angoisses mises en scène jusqu’à l’overdose. Une matière première inespérée de divertissement pour ces médias.

De l’autre côté, ravis de prendre du rab de soupe préparée ci-dessus, les hypocrites repus se chargent de prendre le relais. Souvent ce sont les mêmes que ceux qui appelaient à maintenir le premier tour des municipales au nom de la démocratie et dès le lendemain rajoutaient le filtre « Restez chez vous » sur leur photo de profil Facebook. Le gouvernement a réussi le tour de force de faire passer le message à quelques béni-oui-oui qu’il fallait aller travailler, prendre les transports mais surtout ne pas profiter de la vie, ne pas se promener sans masque ou ne pas trop se rassembler avec ses amis.

Il n’est bien entendu pas ici question de blâmer ceux qui bossent ou de négliger la nécessité de certaines mesures barrières mais bien de questionner cet ordre des priorités qui nous est imposé : le travail avant la vie sociale.

La réouverture des écoles en est l’illustration la plus parlante : l’Education Nationale est en train de devenir une garderie géante permettant aux parents d’aller bosser. Cette décision paraît étonnante et va contre l’avis du Conseil Scientifique et de l’Ordre des Médecins . Jean-Michel Blanquer se colle alors au SAV et affirme : « Il y a plus de risques à rester chez soi que d’aller à l’école ». Ne s’embrassant pas d’embarquer au passage l’ensemble des pédiatres avec lui dans son mensonge. On nous parlerait de prise d’otage pour moins que ça.

Pour Blanquer la « société zéro risque n’existe pas ». Il va donc falloir accepter de prendre des risques utiles (exemple : aller bosser) et bannir les risques inutiles (exemple : voir 11 amis, se promener dans un parc dans une zone qu’un graphiste a coloriée en rouge). Bref, on nous prend pour des enfants à qui on expliquerait la différence entre le bien et le mal.

Refusons cette entreprise de construction d’un homme nouveau à base de famille, sécurité, hygiène et (télé)travail !

Il est hors de question de s’habituer (ou pire, de participer) à cette intrusion de la sphère politique dans notre vie intime. Celle-ci ne doit cesser de nous heurter et ne pas nous transformer en une masse de 67 millions de flics, prêts à dénoncer et culpabiliser ses coupables.

Même le travail est en passe d’être dépouillé du lien social qui s’y forme. Pourtant, le lien social est le seul sens de notre existence, défendons-le de toutes nos forces face à la peur généralisée d’autrui !

Et allez vraiment vous faire foutre avec votre « civisme ».


Jérémy Guichard