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Imaginons un instant que le journal de révérence Le Monde fasse à peu près son travail correctement, ces titres donneraient, à la louche (bien entendu) :


« #lesgiletsjaunes : les médias d’Etat dénoncent désormais les casseurs pour décrédibiliser leur mouvement social et leurs revendications face à la répression d’Etat du gouvernement d’Emmanuel Macron »


Mais encore (oui, rêvons un peu) :

« Gilets jaunes : l’évolution de la contestation vers la violence profite à Macron »

Lorsqu’il s’agit de parler des manifestations à Hong Kong, le journalisme qu’ils désigneraient de « militant » chez nous ne les dérange définitivement pas. Dingue ! Aucune pincette ou de pseudo neutralité, nada. On croirait presque lire Frustration, et c’est vous dire à quel point ils se lâchent.


Or, ce n’est pas comme si une grande majorité de médias télés/radios/écrits s’en donnent à cœur joie du matin au soir pour évoquer en boucle des termes vide de sens tels que « casseurs » ou « violence » des manifestants (plus rarement de la police), afin de décrédibiliser les manifestations de gilets-jaunes ou toute autre mobilisation sociale.

C’est bien connu, les contestations légitimes et les répressions policières se passent toujours en dehors de nos frontières mais s’arrêtent en France, comme le nuage de Tchernobyl. En France c’est du « maintien de l’ordre » qui fait face à de dangereux « casseurs » vêtus de gilets-jaunes fluos qui, il faut le dire, sont particulièrement agressifs pour nos yeux, contrairement aux lacrymos. Gaz qui indigne certains journaux et des stars terriblement engagées telles que Marion Cotillard quand il s’agit des écolos sympas mais pour les manifestants gilets jaunes un peu vilains voire pour certains carrément beaufs, on repassera.

Alors que la France, ce grand pays démocratique, compte déjà une morte au nom de Zineb Redouane dans une indifférence quasi générale et au traitement médiatique extrêmement mesuré, et ce malgré les dernières révélations du site Le Média, la disparition du jeune Steve Caniço ne mérite quant à elle pas d’« alerte enlèvement » en boucle sur nos chaînes infos qu’elle mériterait pourtant.

Et voici ce qu’il se passe, encore et toujours, actuellement dans de nombreuses rédactions : le mimétisme, le suivisme, la légendaire objectivité lorsqu’il s’agit de parler de leur pays par peur de basculer trop à gauche (mon Dieu !) et leur croyance éternelle aux bienfaits de nos institutions apparemment démocratiques et protectrices, on repassera là aussi. 

Le six juin dernier, le journal Les Echos s’inquiétait quant à lui du silence des médias chinois sur les manifestations à Hong Kong, mais n’avait pas l’air de s’inquiéter plus que ça que les gens s’informent pendant plusieurs semaines sur les réseaux sociaux afin de connaître le degré croissant de répressions policières contre les gilets jaunes. 

Nos médias français « libres » font finalement le même job que les médias chinois chez eux, sans même s’en apercevoir (ou pas). Car après tout, s’ils faisaient leur taf correctement, à quoi servirions-nous ?