Aujourd’hui dans Vos Frustrations, une rubrique permettant aux lectrices et lecteurs de partager leurs « frustrations », colères, témoignages ou analyses, Alice* nous parle des pratiques dégradantes des agences de ménage envers les candidates et candidats, critique les conditions de travail dans ce secteur, et appelle à une meilleure reconnaissance du métier ainsi qu’à une responsabilisation des employeurs.
Bonjour,
Je voudrais témoigner au sujet de mes expériences auprès d’agences de ménage chez particuliers.
J’avais postulé auprès de plusieurs agences, et deux d’entre elles, en tous cas, ont une stratégie d’écrasement, d’humiliation des candidats, enfin plutôt candidatEs. Pour O2 et Shiva, leurs tests commencent par … une photo ou un dessin de … chiottes… Il faut écrire les étapes de nettoyage dans l’ordre. Le reste du questionnaire concerne toutes les autres pièces de la maison…
Pour O2 et Shiva, leurs tests commencent par … une photo ou un dessin de … chiottes…
Le mec de l’agence Shiva de ma ville était odieux. J’avais refusé le matin sa modification d’heure de rendez-vous de recrutement pour le début d’après midi, et il n’a pas apprécié. Quand je suis venue au rendez-vous, il a été odieux sur plein de choses. D’abord pas de sourire de prime abord, ensuite, je lui ai dit que j’avais eu une expérience de ménage dans une ville voisine, et que je mettais une demi-heure pour y aller en bus, et là il m’a carrément contredit, en me disant qu’on mettait plus de temps à y aller, et donc il vraiment insinué de que je mentais, et donc que je n’avais pas fait ce job à cet endroit… Violent quoi. Ensuite il était outré que je ne veuille pas récurer des sols 35 heures par semaine, contrairement à ses autres employées. Pourtant, cinq clients par semaine, c’est tout à fait compatible, comme contrat avec cette agence.
Ensuite il me brandit une photo… de chiottes… et me demande si je sais ce que c’est… Il me dit « c’est parti pour le test en pratique ». Il me dit « attention, j’ai mis des pièges dans le test ».
« Je lui dit que je vais chercher une bouteille d’eau, et en fait je prends mon sac, et je claque la porte »
Je l’accompagne dans l’arrière bureau, il cherche des chiffons. Je me sens super humiliée. Je lui dit que je vais chercher une bouteille d’eau, et en fait je prends mon sac, et je claque la porte. Quelques minutes après je lui envoie un sms comme quoi je renonce à la candidature, car je ne veux pas m’humilier. Il me répond qu’il suffisait que je le lui dise sur place, « au lieu de vous enfuir »…
Je lui ai répondu plus tard tout ce que j’ai dit plus haut, combien ses propos étaient déplacés et humiliants. Peut être m’avait-il bloquée entre temps, je n’ai jamais eu de réponse à ce dernier sms.
Il n’existe pas de journée type, en ménage à domicile, car les aides ménagères ont plusieurs clients, et chaque client est différent, avec des habitudes, des demandes différentes.
Autre expérience de candidature, uniquement par téléphone, avec une autre agence, avant Shiva :
La recruteuse me demande de décrire une journée type de quand j’étais en contrat dans une asso quelques mois avant : je lui décris rapidement. Déjà on peut voir la méconnaissance de ces recruteurs sur ce type de travail : il n’existe pas de journée type, en ménage à domicile, car les aides ménagères ont plusieurs clients, et chaque client est différent, avec des habitudes, des demandes différentes.
À la suite de ma description de journée chez tel client, elle me répond: « Vous savez, on a des clients très tatillons »….. Définition de tatillon (déjà ce mot fait très bourgeois…) = exagérément exigent.
Le genre de client qui ne veut pas qu’il reste un micron de poussière au sol et qui paie 9 euro de l’heure net, pour l’employé, avec un crédit d’impôt de 50% pour eux en plus…
Puis elle termine son entretien en me disant qu’elle va débriefer avec ses collègues sur ma candidature. Comme s’il y avait besoin d’un débrief. Et que si elle ne me rappelle pas, c’est que je ne suis pas retenue. C’est vrai que j’avais oublié qu’il fallait bac + 5 pour faire des ménages chez particuliers…
Enfin bref, ayant le pressentiment que je ne serais pas prise, je la rappelle un ou deux jours plus tard et lui dit que je ne pense pas correspondre au profil qu’elle recherche, le genre de client qui ne veut pas qu’il reste un micron de poussière au sol et qui paie 9 euros de l’heure net, pour l’employé, avec un crédit d’impôt de 50% pour eux en plus…
Les employés de ménage devraient être payées beaucoup plus, car leur travail est exigent, physique, et qui comporte une grande charge psychologique, car il faut plaire au client sur notre attitude et notre travail.
Voilà, dans les deux cas, je ne me suis donc pas laissée faire.
Avant, j’ai travaillé 7 mois dans une asso respectueuse, où je pouvais choisir mes clients. J’avais par exemple refusé un jeune bourgeois qui voulait que je fasse la poussière et tout le reste à côté de lui et sa collègue chez lui.
Les employés de ménage devraient être payées beaucoup plus, car leur travail est exigent, physique, et qui comporte une grande charge psychologique, car il faut plaire au client sur notre attitude, et notre travail.
Mais plus sérieusement, il faudrait que ces bourgeois se responsabilisent et fassent leur ménage eux mêmes.
Alice Green
* Le nom a été modifié
Crédit photo : Photo de Giorgio Trovato sur Unsplash
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