A peine élu, déjà haï. La stratégie de la classe dominante pour nous imposer la réélection de son fidèle lieutenant a failli échouer : pendant des mois ses membres ont espéré, prévu, anticipé un “duel” face à Le Pen – qui ne semble être qu’un faire-valoir du candidat bourgeois – et au moment où il a eu lieu, il n’a pas mobilisé les foules. Seuls 38% des inscrits sur les listes électorales ont voté pour le président sortant, soit à peine un tiers du total des Français. Et parmi eux, la majorité l’a fait pour éviter la victoire de l’extrême-droite. Les citoyennes et citoyens satisfaits de sa réélection sont donc moins de 20%. Seul 1 Français sur 5, donc, apprécie le président. Il s’agit de son électorat fidèle : les bourgeois, les sous-bourgeois et toutes celles et ceux que la peur du changement enchaîne à l’ordre établi, aussi injuste soit-il. Un électorat que nous décrivions ici, très peu représentatif de la diversité du pays.
Pour la bourgeoisie, c’est une victoire à la Pyrrhus, du nom de ce roi grec qui, après avoir livré une bataille victorieuse, s’est retrouvé à la tête d’une armée en lambeaux, dans l’impossibilité de poursuivre sa guerre. Il en va de même de Macron : le jeune premier de 2017 est un président gagnant, certes, mais déjà détesté. Sa mauvaise foi et son arrogance se sont étalées aux yeux de tous, sa parole ne vaut plus un kopeck et sa prétendue “intelligence” n’impressionne plus personne. Seuls les journalistes des grands médias parlent encore avec tendresse de son action : on apprenait ainsi lundi que notre control freak de président avait revu lui-même le fichier Excel comportant le nom des candidats aux législatives de son parti. “Emmanuel Macron travaille “papier et crayon en main”, sourit un conseiller. “Il valide tout”, ajoute un autre, “chaque ligne”” nous rapporte France Info : ça les fait rêver, pas vous ?
Ses grands projets pour le pays se limitent à une réforme des retraites dont personne ne veut et qui n’a aucune nécessité économique et financière : c’est le Conseil d’Orientation des Retraites (COR), organisme de technocrate créé sous Sarkozy pour techniciser la question pourtant politique de l’équilibre du régime par répartition, qui le disait à la mi-avril : il y a un déficit, certes, mais pas à long terme, et nulle réforme n’est obligatoire. Les macronistes mentent quand ils nous racontent qu’il faut travailler plus longtemps pour permettre à tout le monde de toucher une retraite décente. La seule justification de cette réforme, finalement, est idéologique. Elle peut se résumer à “travaillez plus, bande de crevards”. Pas sûr que ça suffise à nous convaincre, même si, dans ce pays, la haine de soi et des plus faibles que soi fait du beau travail pour valider les plans de la classe dominante. Mais François Bayrou l’a dit mardi matin sur France Inter : pour que ça passe, il suffira de bien nous expliquer. Car ces gens sont persuadés que nous sommes des idiots, qui ne comprennent pas qu’en nous faisant du mal, nos gouvernants veulent en fait notre bien. Ils feront donc preuve de “pédagogie”, comme la dernière fois donc : à la base de mensonge et de répression.
Macron prépare également une nouvelle réforme du Code du travail, après l’avoir mis en pièces en 2017 : mais les patrons en veulent toujours plus. Ils s’arrêteront de revendiquer le moins-disant social quand nous serons aussi bien payés et traités que les travailleuses et travailleurs du textile au Bangladesh. Et encore, ils réclameront une loi pour que nous venions au travail le sourire aux lèvres et les yeux remplis de “projets”.
Le projet de Macron justement, c’est de forger de nouveaux individus, conformes aux souhaits de la bourgeoisie : une classe de gens terrorisés par Pôle Emploi (qui deviendra donc “France Travail”), sans pouvoir face à leur employeur, sans protection sociale de façon à ne commettre aucun “abus”. Pas de chance, nous n’avons aucune intention de devenir comme ils voudraient que nous soyons.
Et le spectacle pathétique de leur classe sociale dominante sans valeur autre que la consommation ostentatoire, le travail bullshit des cabinets de conseil ou la petite phrase méprisante, bref, tout ce qu’incarne Macron, ne nous fera pas changer d’avis.
Avec Macron, la classe bourgeoise a ce coup-ci misé sur le pire cheval : affaibli, détesté, méprisé, il ne fera pas long feu face à notre colère.
Bon vent les bourgeois, on est là.