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En voilà une non-information. Macron aurait dit, au sujet de sa réforme des retraites, qu’il n’aurait « aucune forme de faiblesse ou de complaisance ». Il ira jusqu’au bout, quitte à être « impopulaire ». Mais mon grand, tu es déjà impopulaire !

Quant à ne faire preuve d’aucune forme de faiblesse ou de complaisance, c’était déjà le credo de tous les gouvernements précédents, au cours des trente dernières années : la classe bourgeoisie française et sa protubérance éditocrate a érigé en vertu le fait d’être capable de décider en piétinant l’avis des citoyens et la capacité à mettre toujours plus bas la classe laborieuse. Le dernier référendum qu’elle a concédé, sur le traité constitutionnel européen ? Écrabouillé. Les dernières manifestations de masse, contre la réforme des retraites de 2013 ? Ignorées. Ils se sont congratulés d’avoir tenu bon contre nous.

« Faiblesse » ou « complaisance » sont des mots utilisés à la place de « respecter les travailleurs » ou « écouter l’avis des gens ». Brrr, ce serait vraiment être une poule mouillée ! pense-t-on dans les milieux d’affaires. Ils conçoivent le gouvernement d’un pays comme ils mènent la direction de leurs entreprises : le verdict des urnes et la protestation de la rue comptent autant que la « boîte à idée » qu’ils installent dans la salle de pause (la pause des salariés, une de leurs faiblesses). La démocratie et le respect de la dignité d’une vie de labeur, c’est un truc de tapette, se racontent-ils certainement entre le golf et le Rotary club. Macron a été envoyé pour faire le boulot de démolition pour leur compte, ils ne veulent donc pas qu’il mollisse, comme eux restent fermes et autoritaires dans leurs entreprises, publiques ou privées.

Le vocabulaire viriliste de la force autoritaire face à l’écoute et la démocratie permet au président de se donner le beau rôle du mâle dominant qui tient bon face aux humeurs du troupeau de moutons râleurs et fragiles que nous serions. Il peut compter sur l’admiration des éditorialistes et des grands journalistes, excités sexuellement par lui depuis son arrivée en politique, pour relayer ce supposé acte de grandeur et de « bonne gouvernance » de la plèbe.

Mais la vérité, c’est que derrière son torse bombé de politicien bourgeois, Macron est la carpette de la grande bourgeoisie patronale et financière : sans elle, il n’est rien. Il serait resté le petit technocrate palot qu’il était, avec sa maison au Touquet, ses vacances au ski et son langage de cadre de la Défense. Il n’est à notre tête que parce que ses membres éminents l’ont voulu, pour faire le travail pour leur compte et leurs belles affaires. Sans leurs dons, sans leurs journaux, sans leurs chaînes télévisées, le gars n’était pas moins pathétique que n’importe quel sous-directeur financier de filiale bancaire.

Déjà, les milieux d’affaires se jettent sur de nouvelles offres de retraites par capitalisation à vendre en masse à toutes celles et ceux qui prennent conscience qu’à cause de leur poulain il ne leur restera rien. Ils vivront très mal le fait que leur protégé s’effondre face à la contestation sociale, qu’il craque face à l’Île-de-France paralysée, qu’il chiale devant sa côte d’impopularité. Alors ils le lâcheront, certainement comme une merde, et iront se trouver un autre candidat « neuf », « hors-système » et « talentueux » pour faire la peau de notre modèle social.

Macron veut jouer la poigne face à nous, mais il se prosterne devant eux. Ne l’oublions pas.