Bernard Friot vient de publier « Prenons le pouvoir sur nos retraites » aux éditions La Dispute, un ouvrage très court, qui résume ses propositions pour que les mobilisations réussissent enfin, non seulement à faire reculer le pouvoir en place, mais surtout à faire des retraites un véritable levier pour se libérer du marché du travail. Si ses analyses sur l’aspect révolutionnaire du modèle de retraite français et sur les errances de la gauche sur le sujet sont tout à fait pertinentes et enthousiasmantes, le modèle global qu’il propose comprend à ce stade trop de lacunes pour être pleinement porteur d’espérance. La quatrième de couverture du livre nous invite à débattre de ses propositions. Alors, allons-y.
Dans les premières pages de son dernier livre, le sociologue et économiste Bernard Friot résume parfaitement ce qui se joue actuellement dans les mobilisations, tant au niveau syndical que parlementaire, contre la réforme des retraites : « La lutte de classes n’est pas le conflit pour un meilleur partage de la valeur entre deux acteurs légitimes, les travailleurs et la bourgeoisie capitaliste, les premiers pouvant partir en retraite plus tôt et avec une meilleure pension par une bonne ponction sur les profits de la seconde. La lutte de classes met en œuvre la contradiction antagonique entre une bourgeoisie qui entend conserver son monopole sur le travail et une classe révolutionnaire, le salariat, lui ôtant tout pouvoir sur le travail ». Nous l’avons souvent écrit chez Frustration, l’enjeu du socialisme n’est en effet pas de mieux répartir les profits réalisés grâce au travail humain pour que le coût du capital soit plus faible et que les salaires et l’emploi soient plus importants. L’enjeu du socialisme, c’est la réappropriation intégrale par les travailleurs de la valeur qu’ils créent tant en termes de rémunération, de temps de travail, que de pouvoir sur les prises de décisions d’investissements et d’organisation du travail des entreprises.
Donc l’enjeu de la mobilisation actuelle ne devrait pas être de trouver de nouvelles sources de financement en faisant, par exemple, cotiser les revenus du capital comme le propose la Nupes, mais plutôt de retrouver la voie du financement historique des retraites en augmentant les cotisations patronales assises sur les salaires, ce qui réduirait de fait les profits et donc les revenus du capital. La gauche s’est piégée elle-même, depuis des décennies, en récitant la bonne leçon bourgeoise de la répartition des richesses par une meilleure fiscalité. Il ne faut pas mieux partager les richesses, il faut se les réapproprier : la définition de la valeur, sa production, sa propriété d’usage et sa destination doivent revenir aux salariés. Ces quinze dernières années, Bernard Friot a largement contribué à donner cette boussole idéologique à de nombreux militants ; il occupe une place centrale dans les débats de la gauche de transformation sociale, il faut donc se pencher sérieusement sur ses travaux.
La perspective tracée par Bernard Friot permet de s’émanciper de la définition capitaliste de la valeur
L’un des apports essentiels de Bernard Friot à la lutte est de démontrer tout ce qui existe déjà dans notre modèle social pour s’émanciper du capitalisme. L’ampleur des cotisations sociales sur le salaire (différence entre le “coût” du salaire pour l’entreprise et le salaire net touché à la fin du mois par le salarié sur son compte en banque) fait de chaque salarié un membre de ce que Marx appelle le travailleur collectif au sens où, selon Friot, « sa contribution personnelle à la production commune n’est pas isolable de celle des autres, pas plus que son salaire total n’en est la contrepartie ». Le régime général des retraites, créé en 1946 (organisé à l’époque, rappelons-le, exclusivement dans des caisses gérées par les salariés eux-mêmes), bâtit un salaire continué : la pension touchée par le retraité est la poursuite de son salaire après l’emploi et non pas une récupération des cotisations versées auparavant. Les retraités sont, pour Bernard Friot, ainsi payés pour leur travail en dehors de l’emploi et donc du marché du travail capitaliste.
Ainsi, pour lui, la retraite n’est pas un transfert de valeur produite par les salariés actifs vers les retraités, mais représente le salaire rémunérant le travail utile à la société effectué librement par les retraités. L’argent distribué aux retraités correspond non pas à une part de la richesse créée par les actifs, mais à la richesse créée par les retraités eux-mêmes. C’est en soi révolutionnaire, car cela considère que la sphère non marchande, celle qui réalise des services qui ne sont pas vendus sur le marché, produit de la valeur économique, qu’ils s’agissent des retraités, qui continuent à être payés après leur emploi, ou les fonctionnaires qui sont payés selon leur qualification et non selon l’emploi qu’ils occupent. À l’inverse, aujourd’hui, on résume la création de valeur économique à la valorisation du capital. Tout ce qui ne valorise pas le capital est considéré non pas comme créateur de valeur économique, mais comme une ponction sur la valeur générée par les entreprises. Les dépenses publiques sont ainsi considérées comme une charge pesant sur les richesses créées par les entreprises, alors que ces dépenses sont elles-mêmes créatrices de valeur.
La perspective tracée par Bernard Friot permet de s’émanciper de la définition capitaliste de la valeur. Il propose d’étendre à son maximum la logique de la cotisation sociale en socialisant la totalité de la valeur ajoutée des entreprises vers une caisse d’investissement (dont il ne parle étonnamment pas dans ce dernier ouvrage) et vers une caisse des salaires qui paierait les salaires de tous. Chacun toucherait ainsi un salaire à vie à partir de 18 ans, qu’on ait un emploi ou pas. Le salaire ne serait ainsi plus lié à l’emploi, propriété des entreprises, mais à la qualification de la personne. Il n’y aurait ainsi plus d’extorsion de plus-value sur le travail des salariés et nous ne serions plus en régime capitaliste.
Les idées de Bernard Friot paraissent éloignées de la réalité du travail
Malgré l’importance des travaux de Bernard Friot, ces derniers présentent des écueils fondamentaux. Le premier, qui saute aux yeux à la lecture de ce livre, est la déconnexion qui apparaît entre ses propos et la réalité du travail. D’abord, son modèle d’organisation qu’il souhaite étendre à toute la société est en particulier celui de l’université, qu’il présente comme « un miracle autogestionnaire », qui lui a permis «d’errer pendant près de deux décennies dans l’interprétation de matériaux documentaires résistants à (ses) hypothèses, de ne pratiquement rien publier pendant ce temps-là ». L’université est pourtant surtout le lieu d’une bureaucratie inégalitaire causant beaucoup de souffrance au travail, tout comme la fonction publique, ce dont ne parle pas Bernard Friot. Il précise qu’il parle de l’université « d’avant les réformes des quinze dernières années », mais les problèmes de domination à l’université étaient déjà largement là à l’époque que glorifie Friot. Les universités sont gouvernées par les titulaires, qui collectivement décident de précariser et d’exploiter les autres. C’est une sorte de démocratie athénienne, dans laquelle une minorité vit en démocratie aux crochets de tous les autres. Bel exemple d’émancipation.
Même en socialisant intégralement l’économie, les mécanismes de domination sociale ne disparaîtront pas mécaniquement, et on risque simplement de remplacer une exploitation par une autre, comme on le constate aujourd’hui dans de nombreuses coopératives ou associations qui n’échappent pas au harcèlement moral et à la discrimination. Ce n’est pas parce qu’on n’est plus subordonné au capital qu’on n’est subordonné à personne. Il faut donc penser une organisation du travail qui permette réellement d’émanciper les travailleurs. C’est là sans doute l’enjeu primordial aujourd’hui, quelles que soient les méthodes avec lesquelles on socialise la valeur. Le risque sinon, est de sombrer dans les dérives bureaucratiques, voire totalitaires, des expériences communistes du XXème siècle. Par exemple, dans le modèle de Bernard Friot, les salariés pourront changer de qualification (et donc augmenter leur salaire sur une échelle de un à trois avec un minimum de 1800 euros mensuel) en « montrant patte blanche » à des jurys de qualification. Chez Frustration, on n’a personnellement aucune envie de se retrouver devant des jurys, qui auront tout pouvoir pour décider de nos parcours professionnels et on ne voit pas vraiment ce que cela aurait d’émancipateur. L’histoire démontre qu’il ne suffit pas d’être en dehors d’une économie de marché pour être bien intentionné et c’est peu de le dire.
Une vision curieuse du fonctionnement des entreprises
Il est symptomatique que le livre de Bernard Friot soit construit sous la forme d’un dialogue fictif (et la plupart du temps invraisemblable, car il écrit bien sûr lui-même les questions et ça se sent fortement) avec des personnes, qui ne sont pas des salariés. Il y a d’abord une ancienne humanitaire en Syrie qui a monté sa coopérative agricole. Il y a ensuite un artisan couvreur travailleur indépendant, puis une retraitée de la chambre d’agriculture. Bernard Friot a une vision particulière du monde de l’entreprise. D’abord, il ne maîtrise pas la manière dont la valeur ajoutée des entreprises est comptabilisée alors qu’il en fait la base du financement de son système. « Comment on finance ? L’apologue qui clôt cet ouvrage préconise le changement d’assiette de la cotisation : la valeur ajoutée et non plus la masse salariale. Car l’assiette masse salariale pousse les directions d’entreprise à sa réduction en réduisant l’emploi et en faisant pression sur les salaires. Elle avantage considérablement les entreprises au cœur du capitalisme, qui sont des entreprises donneuses d’ordre dont la part de la masse salariale dans la valeur ajoutée est faible. En remplaçant les contrats de travail par des contrats commerciaux, elles externalisent vers les fournisseurs, contraints par la concurrence à la stratégie de pression à la baisse sur les salaires. Ce changement d’assiette est indispensable. » , écrit-il, dans une certaine confusion. Il semble ignorer que la valeur ajoutée, c’est le chiffre d’affaires de l’entreprise diminuée des consommations intermédiaires, qui comprennent le recours à la sous-traitance. Ainsi, plus une entreprise a recours à la sous-traitance, plus sa valeur ajoutée est faible. L’assiette valeur ajoutée poussera donc tout autant les entreprises à recourir à la sous-traitance que l’assiette salaire, sinon plus.
De plus, cette sous-traitance est de plus en plus réalisée à l’étranger, pour de nombreux services financiers, administratifs, comptables, informatiques notamment. Sans parler des groupes internationaux qui font baisser artificiellement la valeur ajoutée de leur filiale française en leur facturant, par leur filiale ou holding basée dans des paradis fiscaux, des prestations de management et de communication parfois fictives pour des montants exorbitants. Bref, malheureusement, la valeur ajoutée est en France un panier percé et plus on essayera de la socialiser, plus ce sera le cas. Sans remettre en cause le projet de mutualisation de la valeur ajoutée, il faut prendre en compte toutes ces difficultés pour bâtir un projet réellement applicable.
Sa vision de l’investissement est aussi étonnante. Il critique de manière lapidaire l’idée, selon lui de « faux bon sens », selon laquelle « on ne peut pas affecter toute la valeur ajoutée aux salaires, il faut en réserver à l’investissement », car selon lui « l’investissement est une série d’opérations de production qui ne nécessitent que des salaires ». C’est très étonnant de lire cela sous sa prose, car il proposait dans ses précédents livres la création d’une cotisation économique sur la valeur ajoutée, qui financerait les investissements. Contrairement à ce qu’il écrit désormais, l’investissement ne nécessite évidemment pas que des salaires. L’investissement d’une entreprise, c’est l’acquisition ou à la création d’un bien durable destiné à demeurer au moins un an sous la même forme. Si une entreprise a besoin d’acheter des machines-outils par exemple, c’est bien de l’investissement et ça n’est pas une dépense salariale.
Une vision idéaliste des retraités
Bernard Friot se limite à des raisonnements macro-économiques mais qui n’ont pas toujours du sens dans la réalité concrète. C’est aussi le cas dans sa vision très idéaliste des retraités. On a l’impression à le lire que tous les retraités font du bénévolat dans des associations. Selon lui, la retraite qu’ils touchent est en fait le salaire qui vient en contrepartie de leur activité dans ces associations. Ils ne sont donc pas vraiment bénévoles, mais des travailleurs libres et « la libre activité des retraités une anticipation de ce que pourrait être la libre activité dans le travail ». Cette vision de la retraite est intellectuellement stimulante, mais c’est ignorer que, selon l’INSEE, 80% des plus de 60 ans ne sont pas membres d’une association.
Dans le monde rêvé de Bernard Friot, les salariés seraient retraités à 50 ans et pourraient rester dans leur entreprise en étant protégés contre le licenciement. « Leur rôle serait d’y organiser, contre le management, la libération du travail », écrit-il. Dans son exemple, la retraitée avec laquelle il échange fictivement dans son livre souhaite donc « travailler jusqu’à la mort ». Cela fait froid dans le dos. On peut concevoir qu’on ait le droit de rester dans son entreprise après la retraite, mais il est très improbable que la majorité des retraités souhaiteront rester dans leur entreprise jusqu’à la mort. Par ailleurs, donner des droits spécifiques aux salariés de plus de cinquante ans, qui auraient le droit de faire ce qu’ils veulent dans l’entreprise, d’y venir et d’en partir comme bon leur semble, est une idée curieuse qui créerait d’énormes difficultés d’organisation du travail. Ce point de vue de Bernard Friot vient d’un fort idéalisme. Il semble s’imaginer que tout le monde a envie de s’investir dans son travail ou pour une cause. De plus, la majorité des emplois ne sont pas épanouissants, et même dans une organisation communiste de la société ils ne le seront pas. S’il n’y a aucune contrainte ou incitation dans la société et qu’on touche le salaire correspondant à sa qualification qu’on ait un emploi ou pas, quasiment plus personne n’occupera certains emplois indispensables. Bernard Friot ne répond jamais vraiment à cette objection. Il affirme simplement que les qualifications et donc les rémunérations pourront être incitatives, mais les salariés occupant temporairement ces emplois pour avoir un meilleur salaire auront tout de même le droit, dans son modèle, de les quitter en gardant ce salaire.
Si on applique le programme proposé par Bernard Friot, des millions de salariés quitteront leur emploi. Nombre d’entre-eux risquent de profondément déprimer, car le travail est un lieu d’interaction sociale, et beaucoup de gens n’ont malheureusement que celui-là ; on ne peut pas faire semblant d’ignorer la profonde solitude de nombreux français. Dans la société idéale de Friot, le désarroi de certains retraités risque d’être généralisé à des millions de personnes. « Alors, les personnes qui décident de ne rien faire, moi je n’y crois pas. Parce que notre humanisation dépend de notre contribution à la production de valeur économique. Penser que nous pouvons trouver du bonheur dans une vie passée dans un hamac, c’est quand même une grande illusion. », affirme à ce sujet Bernard Friot dans une interview. Il semble ainsi nier le fait qu’il est parfois très difficile, dans la vie, de savoir quoi faire. On sait à quel point il faut préparer sa retraite pour ne pas déprimer, quand elle arrive. Il faut se prévoir des occupations, ce n’est pas si évident.
La théorie de Friot est parfois une pétition de principe qui s’autojustifie elle-même
Il est par ailleurs probable que l’économie française s’écroule rapidement. Friot semble confondre deux choses : la valeur d’usage (qui se définit par l’utilité du bien sans prendre en compte une relation de ventes ou d’échange) que chacun produit effectivement et la valeur économique qui nécessite une validation sociale. Si je cultive des légumes pour les manger moi-même, je crée de la valeur d’usage mais pas de valeur économique, car il n’y a pas de validation sociale de ma production de légumes, puisque je la consomme intégralement. Précisons que la validation sociale n’implique pas, même dans le capitalisme français d’aujourd’hui, un échange marchand. Le calcul du PIB enregistre en effet la production des fonctionnaires dans les administrations publiques, de l’éducation nationale, de la santé, etc., qui créent bien de la valeur économique payée par l’impôt. Ce paiement des services publiques par l’impôt vient exprimer l’accord de la population sur le paiement collectif de ces prestations. C’est ainsi qu’elles sont validées socialement. Si je ne produis que pour moi-même, il n’y a pas cette validation sociale, donc ma rémunération de retraités ou dans le régime de Friot, de salarié à vie, ne vient pas payer une production de valeur, qui n’existe pas.
Si on touche la même rémunération que l’on ait un emploi ou qu’on en ait pas, des millions de personnes ne produiront plus aucune valeur économique : lire des livres, regarder des séries, passer du bon temps avec sa famille ne crée pas de valeur économique, contrairement à ce qu’affirme Friot, dont le raisonnement est une boucle qui s’autojustifie elle-même : puisque les gens seront payés, c’est donc qu’ils créeront forcément de la valeur. En réalité, ceux qui créeront de la valeur économique financeront ceux qui n’en créent pas et ce sera sans doute insuffisant, ce qui rendra indispensable une création monétaire massive. Comme l’a montré l’économiste Jean-Marie Harribey dans de nombreux écrits, Bernard Friot ne démontre pas sa théorie sur la valeur, qui est en fait une pétition de principe qui propose un énoncé performatif. Selon Friot, puisque tout le monde a le droit à un salaire toute sa vie, tout le monde créera de la valeur toute sa vie.
Le travail de Bernard Friot relève du religieux
On touche là à notre sens le cœur des limites du travail de Bernard Friot : il relève du religieux. Il écrit d’ailleurs dans son dernier livre « Battons-nous pour que le culte capitaliste ne soit plus reconnu et salarié par la République, pour qu’enfin la loi de 1905 s’applique à la religion dominante. » Il critique, à juste titre, la religion capitaliste, mais face à elle il propose une autre religion. « Je me sens obligé de te dire ces choses pour que tu sois assuré qu’il n’y a pas la moindre vilenie ou basse manœuvre de déconsidération quand je qualifie ton jeu de langage de religieux. », disait d’ailleurs Frédéric Lordon dans l’ouvrage qu’ils ont publié ensemble. Bernard Friot est chrétien et son écriture procède parfois davantage de la foi que d’une volonté rationnelle de voir ses idées advenir. « Le Christ passe son temps à mettre en mouvement, ce sont des paralytiques qui prennent leurs grabats et qui marchent, c’est un aveugle qui voit, c’est un sourd qui entend. C’est en permanence ça le Christ, ça n’est pas de la révolte, c’est le surgissement de la vie. Moi comme chercheur en sciences sociales, ma responsabilité c’est d’épier l’émancipation », dit-il notamment. Il a même eu sérieusement le projet d’être prêtre. D’une certaine manière, il l’est d’ailleurs devenu. Le système pensé par Bernard Friot est un système fermé. Sa manière de le présenter dans une logique de « tout ou rien » séduit beaucoup de fidèles, qui n’arrivent plus à penser en dehors de ce modèle et du coup n’arrivent pas non plus à l’améliorer.
Malgré ces importantes réserves, l’apport de Bernard Friot aux luttes sociales en cours est décisif. Il est l’un des seuls à penser réellement une alternative au capitalisme et à tracer les contours d’une société communiste, ce qui a été abandonné par la totalité des partis politiques institutionnels et des organisations syndicales. Les fondements idéologiques de son projet permettent à de nombreux militants politiques et syndicaux de ne pas se laisser embourber dans les projets sociaux-démocrates de la Nupes. Et, surtout, il ne fait pas des salariés des victimes, condamnées à devoir quémander une répartition un peu moins inégalitaire de la valeur qu’ils créent eux-mêmes, mais met en avant au contraire tout le pouvoir qu’ils ont entre les mains. Si ses idées occupent aujourd’hui une telle place dans le milieu militant, ce n’est pas pour rien : ses écrits sont roboratifs face à des décennies de compromissions de la part des partis et des syndicats institutionnels. Plutôt qu’un tout à prendre ou à laisser, continuons à débattre de ses théories pour construire ensemble un modèle social cohérent mettant en œuvre l’idée communiste. Chez Frustration, nous continuerons à ajouter nos pierres à cet édifice.
Guillaume Etievant